À travers mes lectures instantanées dont les origines éclectiques ont envahi la planète Internet, je fus par hasard attiré par un court article d'un photographe de presse sur les prétendus pièges de l'utilisation du noir et blanc en photographie (voir ici). Bien sûr toute critique ou tout argumentaire recèle sa part de vérités du moins du point de vue de son auteur et de ses supporteurs et il serait futile de le nier. Mais encore, l'emploi du monochrome est-il réservé maintenant à son coté strictement d'évocation historique comme le propose ce photo-reporter issus des années numériques? Je me suis posé cette question en la comparant avec ma modeste période professionnelle des années 1980 et 1990 pendant laquelle l'usage du film noir et blanc et de la pellicule en couleur se côtoyait constamment entre la vision journalistique et celle du regard magazine bien présentes dans les deux cas dans l'univers de la presse de l'époque et bien avant l'arrivée massive de l'Internet populaire si omniprésent aujourd'hui.
Nous pouvons légitimement nous demander si l'absence de couleurs induit inévitablement l'oblitération d'informations essentielles sur le sujet tel que le soulève ce photographe d'expérience dans son analyse quand il dit et je le cite ici: "Mais attention : il faut garder en tête que retirer les couleurs d’une image, c’est aussi en retirer de l’information". Mais est-ce bien vrai? Ou alors n'est-ce pas plutôt l'interprétation éditoriale du photographe pour concentrer l'attention de son auditoire sur les éléments d'impact de son sujet photographié? Telle est la question selon moi car toute image fusse-t-elle à l'état "brute" (RAW) ou non, elle n'en demeure pas moins l'expression subjective de son choix de composition et du moment de sa prise de vue. Bref le débat est beaucoup plus large qu'une simple étude de coloration ou de son absence.
Traditionnellement la photographie noir et blanc a été associé à une perception d'authenticité historique qui a peut être reliée à son caractère novateur et à la précision du détail de ses sujets abordés lors de son avènement. Mais dès le départ la photographie était empreinte de la subjectivité de ses auteurs que ce soit par le choix du sujet abordé ou encore par son angle d'approche. Bien sûr la technologie de l'époque obligeait ses auteurs à un rendu monochrome, la prouesse technique de la couleur se réalisant beaucoup plus tard et de façon très graduelle surtout en ce qui concerne sa fidélité et sa pérennité. Plus tard ce sont les techniques d'impression des médias écrits qui ont restreint le rendu photographique au noir et blanc et qui ont limité souvent sa diffusion en couleur au format plus luxueux des magazines.
Certes toute information iconographique incluant celle des couleurs est un élément qui peut ajouter à la véracité du témoignage visuel. Le même raisonnement peut s'appliquer dans la comparaison entre l'image statique versus sa version dynamique (cinématographique et vidéo). Portez un jugement de validité sur un seul aspect technique de l'expression iconographique est foncièrement incomplet et parfois relève une partialité sur la façon d'utiliser le médium photographique. Il s'agit d'une vision tronquée qui rejette à priori la pertinence même du sujet.
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L'usage du noir et blanc en photographie et tous ses corollaires monochromes demeurent, même aujourd'hui, aussi pertinent qu'il y a deux siècles et, plus encore, correspond toujours à une approche médiatique et artistique toujours aussi actuelle. Il participe de plein pied à un mode d'expression visuelle dont la diffusion reste importante dans notre univers de représentations humaines. En toutes choses, l'un ne saurait empêcher l'autre, noir et blanc et couleurs se partageant tout aussi également notre attention. Il n'y a qu'à voir l'engouement toujours renouvelé au rendu monochrome de l'image à travers le temps et les modes dans notre histoire illustrée. La coexistence du noir et blanc et de la couleur ajoute tout simplement à l'enrichissement du médium visuel.
Photos Daniel M
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